L’histoire d’Haïti est marquée par des dates cruciales, symbolisant l’essence même de notre identité en tant que peuple. Notre passé colonial est ponctué de dates auxquelles nous accordons une grande importance. La consécration de notre liberté en tant que peuple le 1er janvier 1804, est entourée d’une série d’événements historiques qui définissent notre identité haïtienne. Le 7 février occupe une place particulière dans notre histoire, marquant une rupture et le début d’une nouvelle ère. Malheureusement, comme de nombreuses autres dates historiques qui perdent de leur solennité, celle du 7 février est passée de symbole à une simple date ordinaire, dépourvue de signification.
Le 7 février est inscrit dans la Constitution haïtienne de 1987, comme le jour de prestation de serment des présidents élus, conférant ainsi une importance institutionnelle à cette date. Elle revêt une double importance dans l’histoire d’Haïti, marquant en 1986 la fin de plus de 30 ans de dictature des Duvalier et symbolisant l’adoption d’un nouveau régime politique, la démocratie. Cette journée représente une rupture fondamentale avec l’autoritarisme, le totalitarisme et essentiellement la dictature.
De 1986 à nos jours, la date du 7 février n’a pas toujours été respectée conformément à la constitution. Certains présidents ont été investis dans leur fonction à une autre date que le 7 février. Le non-respect de cette date, altère la sacralité de l’investiture des présidents ayant pris leur fonction à une autre date.
Malgré les évènements qui ont suivi le départ de Jean-Claude Duvalier après 1986, le peuple haïtien a célébré le 7 février 1991, l’investiture du premier président haïtien élu démocratiquement. Le 7 février est ainsi passé d’une date symbolisant la rupture à la dictature à une date démocratique légitimée par le pouvoir des urnes. Cela souligne que le symbolisme du 7 février repose sur l’organisation d’élections régulières, garantissant la légitimité du pouvoir et l’alternance politique. Lorsque les élections ne peuvent pas avoir lieu à la date prévue par la constitution pour se conformer au 7 février, cette date perd automatiquement de son importance.
Le 7 février aurait dû être un moment de célébration pour le peuple haïtien, marquant la fin de la dictature et symbolisant la reconnaissance de cette libération. Il aurait également dû être une occasion annuelle de réflexion profonde sur l’Etat haïtien en tant que garant de la bonne marche du pays. Malheureusement, le 7 février est devenu synonyme de turbulences politiques, de luttes fratricides pour le pouvoir. Nous avons du mal à nous rappeler la dernière fois où nous avons vécu un 7 février dans la tranquillité, la paix et la stabilité. Et encore aujourd’hui, en ce mercredi 7 février 2024, nous sommes plongés dans une incertitude totale quant à l’issue de cette journée et quant à ce que l’avenir nous réserve.
Il est évident que le 7 février n’est pas la seule date à avoir perdu de son symbolisme. Cependant contrairement à certaines dates historiques que nous commémorons pour préserver notre mémoire collective, le 7 février revient chaque année. Il nous incombe donc de veiller à ce qu’il retrouve sa signification symbolique dans notre histoire.
