Vendredi 30 décembre, 7 heures du soir. Une petite foule de jeunes gens s’attroupent dans un coin sombre de la rue Capois. Ici, des hommes et des femmes parlent de sexe, se touchent et négocient l’air de rien. Nous sommes avec les putes (« bouzen » en créole) et les hommes qui les fréquentent, les fils de putes.
Le coin fonctionne comme un marché de chair. On préfère les plus fraîches, on tâte la chose avant de se décider et on marchande. Puis, on s’injurie et on rit en même temps. « Pendant les fêtes, les clients affluent », dit R., prostituée depuis cinq ans.
Femmes et hommes, chacun a ses raisons d’être là. D’un côté, la situation du pays, des parents absents, des petits à occuper. De l’autre, des hommes qui ont marre de draguer, qui ont pris trop de « coups », ou une femme qui ne veut plus coopérer. « Madanm mwen ap fè kaka » glisse T., qui connaît tous les bars à putes de la ville. Tous se retrouvent sur ce trottoir de la rue Capois comme pour se consoler.
La nuit est maintenant profonde. Les conversations se sont arrêtés. Tous boivent des coups. Personne n’a honte d’être là, sauf celui, trop coincé, qui ne veut pas « consommer ».
