Le Conseil supérieur du Pouvoir judiciaire (CSPJ) a récemment lancé une initiative majeure en partenariat avec le Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations unies et l’École de la magistrature (EMA) pour renforcer les compétences des magistrats haïtiens dans la lutte contre les violences sexuelles. Une session de formation de deux jours a été inaugurée le mardi 19 septembre 2023 à l’Hôtel Retrouvailles, au Cap-Haïtien, marquant ainsi le début de cette série de formations cruciales.
La délégation de magistrats, composée de Wando Saint-Villier, doyen du Tribunal de première instance de Hinche, représentant des juges des Tribunaux de première instance au CSPJ, de Magarette Toussaint Georges, juge d’instruction au TPI de Fort-Liberté, et de Marthel Jean Claude, juge d’Instruction au TPI de Port-au-Prince, a dirigé cette première journée de formation. Ils ont partagé leur expertise et ont encouragé la sensibilisation des participants.
Cette session de formation cible les magistrats de la juridiction des cours d’appel, regroupant 28 participants venus des juridictions des Tribunaux de première instance du Cap-Haïtien, de Fort-Liberté et de la Grande-Rivière-du-Nord. Cette formation s’inscrit dans le cadre d’une série de formations qui seront organisées dans les 18 juridictions du pays, marquant ainsi un effort national pour lutter contre les violences sexuelles en Haïti.
Le juge Wando Saint-Villier, membre du CSPJ, a souligné l’urgence d’agir face à la crise persistante de violences sexuelles en Haïti, malgré les nombreux défis auxquels fait face le pays, tels que l’instabilité politique et la mauvaise gouvernance. Il a noté que « Des filles aussi jeunes que 10 ans et des femmes âgées ont été victimes de violences sexuelles, y compris des viols collectifs depuis plus d’une décennie », citant un rapport conjoint du Bureau intégré des Nations unies en Haïti (BINUH) et du Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations unies publié en octobre 2022.
Me Saint-Villier a souligné que ce projet de formation sur les techniques d’investigation en matière de violences sexuelles permettra aux magistrats de mieux prendre en charge les victimes de violences sexuelles et de traiter leurs dossiers avec soin et professionnalisme. Il a ajouté que les sanctions infligées aux auteurs de ces crimes devraient contribuer à dissuader et à réduire le niveau de violences sexuelles en Haïti, en référence à l’article 53 de la loi du 15 novembre 2007 relative à l’École de la Magistrature.
Le CSPJ prévoit également d’organiser d’autres sessions de formation continue pour les magistrats en partenariat avec des institutions internationales, visant à renforcer leurs compétences techniques et à améliorer la prise en charge des victimes de violences sexuelles.
Laura Galvez Castrillo, représentante du Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations unies (OHCHR), a rappelé l’adoption d’une nouvelle résolution par l’ONU en septembre 2022. Cette résolution vise à promouvoir la coopération internationale pour garantir aux survivants de violences sexuelles l’accès à la justice, aux recours légaux et à l’assistance. Elle a également exhorté les États membres à prendre des mesures efficaces pour améliorer le soutien juridique aux victimes et garantir leur accès à la justice.
Au cours de cette session de deux jours, les intervenants ont adopté des méthodes andragogiques et participatives pour favoriser des échanges fructueux et une meilleure compréhension des sujets abordés.
Il est à noter que depuis le séisme du 12 janvier 2010, les violences sexuelles en Haïti, en particulier dans les camps de personnes déplacées, ont connu une augmentation alarmante, renforcée par la recrudescence des activités des gangs dans diverses régions du pays, en particulier dans la capitale. Ces violences sexuelles représentent une part significative des affaires criminelles traitées par les tribunaux, ce qui rend d’autant plus essentiel le renforcement des compétences des magistrats pour lutter contre ce fléau.
