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Les festivités de Lakou Soukri Danache : mémoire des ancêtres et transmission du vodou selon le rite Congo

Chaque année, le 14 août, la cité de l’indépendance s’illumine au rythme des tambours, des chants et des prières des vodouisants rassemblés à Lakou Soukri Danache. Ce haut lieu mystique de l’Artibonite, considéré comme l’un des trois sanctuaires vodou les plus importants du département, commémore la fête annuelle en hommage aux ancêtres qui ont lutté pour la liberté d’Haïti.

Selon le houngan Jerry Benjamin, secrétaire général du Lakou, la célébration met en lumière l’esprit de résistance qui a animé les insurgés, en particulier lors de la cérémonie du Bois Caïman, événement fondateur de la révolution haïtienne. Bien avant que Zinzin Figaro, premier serviteur de Soukri, n’y installe son autel, cet espace servait déjà de lieu de ralliement sûr pour les combattants issus de la tribu Congo. Cette mémoire historique explique la forte présence, encore aujourd’hui, de loas de l’empire du Congo tels que Papa Bazou — père des « 101 lanchon » du panthéon vodou —, Zinga, maître des recettes curatives, ou encore Loufiatou Kanga et Loumba Zaroun.

Les festivités de Soukri, qui s’ouvrent dans la nuit du 14 au 15 août avec les rites dédiés à Kafou et Legba, se déploient sur plusieurs semaines et se clôturent le 6 septembre par le « ranvwa »Congo et Gede. Durant cette période, les cérémonies se succèdent, donnant lieu à des moments de ferveur où se mêlent prières, danses et rituels ancestraux. Le principal rite adopté demeure le congo, danse et transe qui rappellent les origines africaines et la puissance de l’esprit collectif.

L’organisation de ces célébrations repose sur la solidarité des héritiers du Lakou et des « pitit fèy », initiés venus de l’extérieur. Chacun contribue, selon ses moyens, à l’entretien et à la pérennité de la tradition. Le vivre-ensemble et l’intérêt collectif forment ainsi les piliers de Soukri Danache, espace de mémoire mais aussi de continuité culturelle.

C/P: Marco Photo

Outre le 14 août, une autre date occupe une place particulière dans le calendrier du Lakou : le 6 janvier, jour consacré à Papa Bazou. Chaque début d’année, une cérémonie lui rend hommage, prolongeant le lien entre les générations et entre les mondes visibles et invisibles.

La mémoire du fondateur, Figaro Pont-Gaudin, reste également vivante. La tradition raconte qu’il aurait sauvé la fille d’un colon condamnée à mourir. En reconnaissance, ce dernier l’affranchit, permettant ainsi la fondation de Soukri Danache, espace désormais inscrit dans la mémoire collective d’Haïti.

Les festivités de Lakou Soukri Danache dépassent donc le cadre religieux. Elles incarnent la transmission des savoirs ancestraux, la célébration des racines congolaises et l’hommage aux héros de l’indépendance, rappelant que la liberté d’Haïti est intimement liée à la force spirituelle de ses ancêtres.

Houngan Jerry Benjamin